Les Favelas brésiliennes créent leur propre banque
LES FAITS
- Les 10 plus grands bidonvilles du Brésil ont choisi de s'allier pour faire face à la crise financière qui touche dûrement les plus pauvres habitants du pays suite au Covid-19. Elles lancent pour cela leur propre banque.
- Cette nouvelle offre a été baptisée la "banque du G10", pour faire référence à ses 10 créatrices comptant parmi les plus importantes favelas du pays (à Sao Paulo et Rio notamment).
- Son ambition est clairement tournée vers l'inclusion des populations les plus pauvres du Brésil, rejetées le plus souvent par le système financier traditionnel.
- La banque du G10 devrait proposer :
- des micro-prêts à destination des petites entreprises (de 1 000 à 15 000 réals, soit de 150 à 2 300 €)
- des cartes de débit pour aider les habitants des bidonvilles à mieux s'intégrer dans le système bancaire traditionnel
- des services bancaires de base
- Les prêts et services seront délivrés à taux bas ou sans frais, contrairement à la plupart des produits de crédit du pays, pour lequel les taux appliqués sont très élevés.
- Les cartes de débit serviront aussi à verser les aides sociales aux familles qui pourront ainsi les dépenser.
ENJEUX
- Une banque solidaire pour pallier des inégalités profondes : environ 45 millions de Brésiliens ne disposent pas de compte bancaire, selon une étude réalisée en 2019 par l'institut Locomotiva. Cette situation n'a fait que s'aggraver depuis 2020. Le principal objectif de la création de cette nouvelle banque est d'ouvrir l'accès au micro-crédit à des entreprises indispensables à la vie des favelas ; c'est le cas par exemple des restaurants communautaires qui distribuent des repas aux plus fragiles. La baisse des dons les a fragilisés et le coût du crédit ne leur permet pas d'emprunter pour continuer leur activité. C'est donc à cela que veut remédier cette banque solidaire.
- Un modèle humanitaire adapté aux spécificités des favelas : La banque disposera d'un capital initial de 1,8 million de reals (environ 335 000 dollars), financé par des investisseurs anonymes. Un tiers des fonds seront dédiés à des programmes sociaux. Cette banque vient prendre le relais des établissements traditionnels qui ne s'implantent pas dans les favelas pour des raisons de coût et de sécurité. Elle est aussi le fruit d'une longue tradition d'auto-organisation qui régit la vie de ces banlieues, dotées de leurs propres commerces.
MISE EN PERSPECTIVE
- Une situation économique et sociale désastreuse, accentuée par la crise sanitaire. Le Brésil est le second pays à avoir été le plus durement touché par la pandémie de Covid-19. Il compte ainsi plus de 225 000 morts, juste après les Etats-Unis. Mais les conséquences sanitaires ne sont pas le seul fardeau de la pandémie. L'économie du pays a tout autant été touchée par la crise sanitaire et ce sont les populations les plus pauvres qui en font particulièrement les frais.
- À la suite de la flexibilisation du code du travail en 2017, accentuée par la politique ultralibérale du ministre de l’économie Paulo Guedes, plus de 40 millions de Brésiliens sont devenus des travailleurs informels ou auto-entrepreneurs, payés à la journée et privés de protection sociale, en particulier dans le cadre de cette crise sanitaire.
- L’aide d’urgence consentie par le gouvernement actuel jusqu’en décembre laisse aujourd'hui la place à 14 millions de chômeurs sans ressource. Il est donc de plus en plus difficile pour de nombreux Brésiliens de rentrer dans les cases fixées par les organismes financiers pour obtenir des financements par exemple.