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PFF 2018 - Banques/fintechs : saine collaboration ou union sacrée ?

Le Paris Fintech Forum 2018, organisé les 30 et 31 janvier à Paris, l’a démontré : l’évolution du secteur financier ne peut désormais plus occulter les fintechs, sociétés technologiques du monde de la finance longtemps pointées comme concurrentes potentielles des institutions bancaires.

De la réglementation à la stratégie en passant par les positionnements individuels, les acteurs convergent vers une collaboration qui s’avère décisive pour la construction des services bancaires de demain.

Une question centrale subsiste cependant : l’union débouchera-t-elle sur une consolidation des acteurs et amorcera-t-elle une réelle refonte des modèles ? 

 

« Agnostique ». Un terme longtemps répété par les acteurs des marchés financiers, prompts à se lancer dans les innovations et à étendre leurs plateformes selon une logique ouverte, en réponse aux évolutions du marché, notamment réglementaires.

Wirecard, prestataire reconnu sur le marché des paiements, peut être cité comme exemple sur ce sujet. Markus Braun, CEO de la société, qui s’est exprimé lors du Paris Fintech Forum 2018, l’a ainsi déclaré : « Nous avons démarré notre activité en tant que PSP et souhaitons désormais adresser l’écosystème du marché des paiements dans sa totalité ». Agnostique en termes de technologie, l’acteur se veut opportuniste, misant sur une plateforme ouverte.

Un positionnement clair qui reflète bien des stratégies adressées au sein d’un secteur évolutif, aussi bien en termes de réglementation que de technologies. Exemple : les multiples débats liés à la blockchain, désormais affranchie du sujet plus problématique du bitcoin, dont les avantages – vitesse, sécurité, valeur ajoutée… - sont clairement identifiés par les acteurs du marché alors même que les contours réglementaires restent à construire. Sources d’agilité, les fintechs constituent dans ce domaine de réels partenaires à valeur ajoutée pour les acteurs bancaires et nul doute que la DSP2 permettra de franchir un nouveau cap dans la relation entre ces acteurs et les institutions du monde bancaire grâce, notamment, à l’émergence de l’open banking.

Les banques dans une « approche positive »

Pour Jean-Laurent Bonnafé, CEO de BNP Paribas, l’apport des fintechs pour le secteur bancaire est clair : « Elles offrent des solutions que nous ne pouvons pas délivrer ». Et de fait, leur force est leur agilité, qui leur permet de développer une nouvelle vision du marché, différente de celle déjà déployée par les banques et les régulateurs, et ainsi d’adresser de nouvelles cibles. Exemple : le Compte Nickel, récemment acquis par l’entité, qui propose une offre de compte délivrée en bureau de tabac. BNP Paribas souhaite développer sa collaboration avec les fintechs selon une approche positive, axée sur la création de services efficients.

Même positionnement pour le groupe BPCE, qui a récemment acquis Fidor Bank et compte de nombreuses alliances avec des fintechs, dont la plus récente – avec Meniga - a été annoncée le 31 janvier au matin à l’occasion du Paris Fintech Forum.

Crédit Mutuel Arkéa, qui a fait de l’acquisition de fintechs un réel axe stratégique, va plus loin. Pour Ronan le Moal, CEO, le fait de travailler avec les fintechs est « un état d’esprit » et les perspectives d’évolution ne sont pas négligeables compte tenu des possibilités offertes par les innovations du type DSP2, ou encore PFM. A terme : « Créer un hub financier connectant différents acteurs ». En somme, une convergence des positionnements aboutissant à une situation décrite par Nicolas Théry, chairman, Crédit Mutuel CM11, pour résumer l’activité de l’entité : « Pas seulement une banque : une réelle structure de services à destination de tous les consommateurs ».

Régulateurs et pouvoirs publics dans une logique d’ouverture

Dire que les banques sont les seuls acteurs engagés dans la voie de l’union avec les fintechs serait un leurre. Présent au Paris Fintech Forum 2018, François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France, a ainsi démarré son intervention en déclarant que « la Banque de France est engagée aux côtés des fintechs », rappelant la création récente d’un lab axé sur les innovations ainsi que les relations étroites du régulateur avec les hubs dédiés Station F et Swave. « Nous allons assister à une convergence entre les anciens et les nouveaux modèles », affirme-t-il, ajoutant que « les paiements et la data seront probablement les domaines clés du changement ».

Soucieuse d’étudier les effets de cette évolution, la Banque de France a profité de l’événement pour annoncer la création d’une taskforce regroupant ACPR, banques et fintechs et dédiée à l’une des principales innovations débattues en ce moment : l’intelligence artificielle. Objectif : le développement d’une expertise sur ce sujet de façon à conjuguer innovation avec sécurité.

Le régulateur s’est également exprimé sur une autre technologie : la blockchain, rappelant qu’il s’agit d’une innovation à fort potentiel séparée de la problématique bitcoin, laquelle n’est pas une monnaie mais « un actif purement spéculatif » qui doit être régulé, notamment en raison des risques présentés en termes de blanchiment de capitaux.

La Banque de France n’est pas la seule entité engagée dans cette vague dans la mesure où les pouvoirs publics eux-mêmes, présents à l’événement, ont témoigné de leur intérêt pour la tendance fintechs et innovation caractérisant le secteur financier, perçue comme un atout pour la Place financière de Paris, selon les déclarations respectives de Bruno Le Maire, ministre des finances et Valérie Pécresse, présidente de la région Île-de-France.

Une tendance collaborative qui n’est pas propre à l’Hexagone puisque les ministres des finances belge, luxembourgeois et lituanien ont présenté, chacun à leur tour lors d’une session dédiée, la façon dont la logique d’ouverture est envisagée dans les différents pays. Et la palette est relativement riche. Expérimentations et nouvelles technologies en Lituanie – pays ouvert sur le digital - coopération entre secteurs public et privé au Luxembourg, écosystème collaboratif en Belgique : tous semblent tournés vers une logique d’ouverture et d’innovation.

De quoi justifier les propos de Bruno Le Maire, alertant sur la nécessité de maintenir une concurrence et une réglementation « équitables » en Europe, de façon à garantir la juste évolution du marché notamment face aux risques croissants tels que le financement du terrorisme, l’une des priorités numéro un du continent.

 

L’IA : une équation à de multiples inconnues

Sujet de débat du moment, l’intelligence artificielle a été maintes fois abordée lors du Paris Fintech Forum et a même fait l’objet d’une session dédiée, axée sur les « mythes et réalités » de cette innovation. A date, le constat est posé : à l’image de la data, l’intelligence artificielle peut permettre de créer de nouveaux modèles et serait même, selon certains professionnels, potentiellement « plus disruptive qu’Internet ». Plusieurs interrogations subsistent cependant, notamment technologiques – certains contours techniques restant à établir – mais également et surtout éthiques, sur les « best practices » à entreprendre dans ce domaine. « La question repose sur le type de société que nous souhaitons créer », s’interrogent les professionnels, ajoutant que « la création de standards réglementaires est essentielle, afin de susciter des comportements éthiques ». De quoi confirmer que si l’intelligence artificielle constitue une innovation prometteuse pour le secteur financier, il reste néanmoins difficile de s’y concentrer et de s’y développer, à date, selon une stratégie core business.

 

L’insurtech : un moyen d’explorer de « nouveaux territoires »

Moins avancée – et médiatique – que la fintech, l’insutech n’en reste pas moins un axe de développement non négligeable pour les marchés financiers. Data et différents types de collaborations pourraient ainsi permettre d’explorer de « nouveaux territoires » sur un marché où les professionnels convergent sur l’idée que l’évolution est peut-être un peu « moins rapide » que dans la banque. De même pour le secteur de l’asset management, qui envisage les nouvelles technologies, comme « un moyen » mais jamais comme « un but », selon les propos d’Yves Perrier, CEO, Amundi.

 

Andrea Toucinho, consultante moyens de paiement et services financiers ADN’co