Le télétravail, entre espoir et désillusion
La crise sanitaire inédite liée au Covid-19 a poussé de nombreuses organisations à une transformation accélérée, qui comprend notamment la réinvention des modes de travail. Le télétravail a connu son âge d'or, avec la promesse soutenue par de nombreux acteurs de se pérenniser. Pourtant, le cabinet Gartner fait aujourd'hui le constat que le travail hybride touche aujourd'hui ses limites et que les entreprises reviennent sur leur engagement. Mais au-delà de cette approche technologique, cette évolution interroge aussi sur l'avenir des modes de travail à travers la notion d'engagement et de relation à l'entreprise, qui restent à réinventer.
LES FAITS
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La crise sanitaire a précipité l'usage massif du télétravail dans les secteurs d'activité qui le permettaient, donnant un coup d'accélérateur à l'implémentation du travail à distance.
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Mais derrière la promesse de pérénisation d'un modèle gagnant/gagnant, de nombreuses entreprises s'emploient aujourd'hui à revenir sur des modalités de travail mises en place à marche forcée.
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Le cabinet Gartner s'est appuyé sur les données du Bureau américain des statistiques du travail (BLS) pour analyser les effets du passage au travail hybride dans de nombreuses entreprises, et surtout, la pérennisation de ce modèle.
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En termes de statistiques, Gartner constate que la part de salariés en total télétravail et celle des salariés en présentiel uniquement, se sont réduites. Pour autant, le travail dit "hybride" s'avère être un échec, tant du point de vue du management, que du point de vue des collaborateurs. De plus en plus d'entreprises des secteurs public comme privé, en passant par les organismes gouvernementaux, limitent aujourd'hui le recours possible au télétravail en exigeant au moins en partie du présentiel.
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Paradoxalement, une baisse légère, mais régulière, de la productivité des salariés a été constatée depuis la fin de la pandémie, en même temps que le nombre d'employés travaillant de manière hybride a régulièrement augmenté (le nombre de télétravailleurs à temps plein diminuant intrinsèquement).
ENJEUX
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Une évolution logique : Selon les analystes de Gartner, cette évolution du télétravail, vue par l'angle technologique, est typique de l'adoption des innovations. Le cabinet identifie ainsi des phases pour chaque grand changement, incluant un schéma d'engouement, d'adoption, de désillusion et, finalement, de productivité. Le télétravail serait actuellement dans la phase de désillusion, mais pourrait encore rebondir, à condition toutefois que certaines évolutions se fassent en parallèle : changement des modes de management, démocratisation des applications de gestion de l'environnement de travail, développement des équipements appropriés dans les bureaux, etc. Autant de conditions nécessaires pour permettre de rétablir la confiance.
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Une nécessité d'adaptation pour atteindre la pérennisation : Les nouvelles organisations de travail ont été mises en place dans la précipitation, comme des stratégie d'adaptation face à une crise inédite. Or pour être adoptées de manière pérenne, elles doivent encore se soumettre à une phase d'adaptation aux réalités du marché, hors pandémie. Cette adoption passe aussi par une réinvention plus globale de la relation entre l'entreprise et ses collaborateurs. Cette révolution est donc loin de se cantonner à l'approche technologique de Gartner, mais touche aussi à l'évolution du rapport au travail.
MISE EN PERSPECTIVE
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Selon les données recueillies par la société Kastle Systems, spécialisée dans les données sur les lieux de travail, le taux d'occupation hebdomadaire moyen des immeubles de bureaux situés dans 10 zones métropolitaines des États-Unis était sous les 50 % dernièrement.
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Le recours au travail hybride reste donc important, et un retour en présentiel total serait difficile à mettre en place. D'autant que le télétravail conserve des soutiens de taille, comme les entreprises Airbnb ou celle de l'éditeur de logiciels Atlassian qui pointent du doigt les réunions inutiles plus que le télétravail comme les coupables de la baisse de productivité des salariés.