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La révolution Instant Payment est en marche !

L'avis d'expert de Philippe Coiffard

En cette période estivale, et à l'approche des échéances de la rentrée, nous republions ci-dessous la newsletter de Philippe Coiffard dédiée à l'Instant Payment et initialement publiée sur notre blog en mai dernier.


Commande de l’ERPB [1] à l’EPC [2], l’Instant Payment (IP) présente l’énorme avantage d’un cahier des charges simplifié à l’extrême :

  • 10 secondes [3]
  • Crédit immédiat
  • Irrévocabilité [4]
  • Disponibilité 24/7/365
  • Lancement novembre 2017.

Cette newsletter se propose de présenter une synthèse des bouleversements qu’une expression de besoins, aussi simple, initie.

10 secondes !

Tel est le délai autorisé entre l’ordre de paiement, donné par le payeur, et, la possibilité pour le bénéficiaire de réutiliser les fonds qui viennent de lui être versés, et ce :

  • Quelle que soit la géolocalisation de l’émetteur/payeur
  • Quelle que soit la géolocalisation du bénéficiaire
  • Quel que soit leur établissement de paiement respectif, banque ou prestataire de services de paiement
  • Quel que soit le contexte à l’origine de la transaction entre les deux parties [5].

Dans une industrie des paiements, traditionnellement organisée autour de vacations récurrentes, parsemées le long d’une journée d’échanges des paiements de masse, une telle innovation constitue, à l’évidence, le premier bouleversement quant aux modes de production et d’échanges des flux d’opérations.

L’industrie paneuropéenne des paiements se lance dans le temps réel : la gestion de flux au fil de l’eau.

Les perspectives

Elles sont nombreuses pour ne pas dire illimitées. Quelques exemples parmi d’autres :

  • Deux personnes déjeunent ensemble ; la première règle la note par carte bancaire – elle ne connait pas encore l’Instant Payment – et la seconde la rembourse immédiatement d’un IP : la première est créditée avant que le débit de sa carte ne soit effectif.

 

  • Un adolescent Erasmus appelle ses parents pour un besoin urgent, dans la minute qui suit, son compte se voit crédité de nouveaux fonds substantiels.

 

  • Un organisme social émet des virements sociaux vers une population sensible. Il prépare ses IP et les adresse à ses prestataires de services de paiement (PSP) avec comme consigne exécutoire : règlement tel jour à telle heure pour tous les assurés sociaux. Le jour dit, ces derniers sont tous crédités dans les 10 secondes suivant l’émission des IP par les PSP de l’organisme social.

 

  • Une entreprise souhaite que ses salariés reçoivent le même jour à la même heure leur salaire quelle que soit leur domiciliation. L’IP répond, une nouvelle fois, présent.

 

  • Un site d’e-commerce souhaite ouvrir une nouvelle gamme de services ou de produits, et, lassé des commissions exorbitantes qui lui sont prélevées par ses partenaires bancaires ou constatant un taux de fraude élevé en constante progression, veut mettre en œuvre de nouvelles modalités de paiement. L’IP lui offre cette possibilité avec le luxe d’être crédité sous 10 seconds et, donc, de ne plus s’inquiéter « fraude ou pas ? » ou « puis-je ou non livrer la marchandise ? ».

 

  • Ce qui est vrai pour l’e-commerce l’est tout autant pour la distribution, grande et petite, les grands magasins, mais aussi les commerçants de proximité quelles que soient leurs activités.

Second bouleversement, l’Instant Payment est universel à tous les contextes commerciaux, administratifs, publics ou financiers.

LE principe premier de l’ordre de paiement

L’Instant Payment remet le payeur au cœur de la chaîne des paiements : lui et lui seul est responsable du paiement, il en est son initiateur. C’est bien là, LE principe premier de cette nouvelle instruction de paiement : l’émetteur est l’auteur originel et décisionnel de son paiement. En ce sens, l’Instant Payment rétablit la confiance, renvoyant à l’origine latine du mot « fiduciaire » [6], qui veut que lorsque deux parties engagent une transaction commerciale, salariale, administrative, etc… chacune le fasse en confiance de l’autre, quel que soit leur rôle respectif : prestataire/assuré social, entreprise/salarié, client/commerçant fournisseur, payeur/bénéficiaire dans le seul but que la partie réceptrice de la prestation de l’autre soit décisionnaire et initiatrice de son règlement.

Il s’agit là encore d’un autre bouleversement, notamment en France où la confiance n’est pas toujours le maître mot des relations commerciales/financières faisant préférer aux grands organismes le prélèvement, parfois au détriment de débits inexplicables qui conduisent les débiteurs à penser « tous ceci » quand les premiers estiment « tous cela ».

L’Instant Payment crève l’abcès de cette philosophie du négativisme « tous ceci » ou « tous cela »… faut-il, encore, avoir confiance dans la partie, non plus adverse, mais avec laquelle « on » partage un projet commun fût-il l’addition d’un repas.

Les conséquences sur les métiers des paiements

L’Instant Payment est la première attaque objective de la communauté bancaire contre le chèque. S’appuyant sur le sacro-saint principe énoncé ci-dessus, l’IP est entièrement et totalement à l’initiative du payeur et, pour le bénéficiaire, c’est l’assurance d’être payé immédiatement plus rapidement que par tout autre moyen de paiement.

Au-delà, il est vraisemblable d’espérer réduire de façon drastique la masse monétaire : les billets et les pièces. L’IP contribue à moyen ou long terme à la dématérialisation, voire à l’abrogation pure et simple du papier-monnaie.

Ces deux moyens de paiement, fortement utilisés en France, ont encore quelques belles années devant eux, mais, incontestablement, la programmation de leur fin vient à l’ordre du jour.

Plus près de nous, l’Instant Payment promet assurément la fin de la carte de paiement… pas tout de suite, mais dans un avenir vraisemblablement proche. Pensez donc : un commerçant, au titre de son contrat d’acceptation des paiements par cartes, est prélevé de la fameuse CIP [7] que reverse sa banque à la banque du porteur. Ce dernier, bien souvent, paie une cotisation annuelle pour détenir une carte, dont il n’est que l’utilisateur, le propriétaire de la carte restant sa banque. Le commerçant inclut tout ou partie de la CIP dans ses prix de revient. Au final, le porteur paie l’obtention d’un moyen de paiement dont chaque utilisation lui coûte une majoration du prix réel de revient [8].

L’Instant Payment bouleverse le modèle économique associé à la carte de paiement : plus de cotisation annuelle pour le débiteur, plus de commission pour le commerçant. Vers quel moyen de paiement, pensez-vous que l’un et l’autre vont se tourner ?

La commission interbancaire de paiement est un facteur essentiel du PNB des établissements émetteurs de cartes de paiement. Dans la mesure où l’Instant Payment conduit à une réduction sensible, dans un premier temps, progressive dans une seconde phase, puis définitive à moyen terme, des commissions, donc de leur PNB, combien d’établissements de paiement continueront à émettre des cartes de paiement ?

Au chapitre des cartes de paiement, c’est aussi la fin de la pratique des dépôts de garantie et autres cautions telles que pratiquées – en France – par les loueurs automobiles [9].

Autre solution qui risque de pâtir de l’avènement de l’Instant Payment : RUBIS [10], le virement proposé dans l’offre S€PAmail. En effet, comment un système de paiement à 8 coins, 4 administratifs + 4 pour le paiement, pourrait-il perdurer quand l’IP permet un règlement en 10 secondes ? Quel créancier va se lancer dans l’émission d’une demande de règlement d’un virement RUBIS dont l’issue est soumise à l’acceptation par son client de la proposition transmise par sa banque, alors qu’un brin de confiance entre le créancier et le client permet à ce dernier de régler son fournisseur en 10 secondes ?

L’IP va-t-il vraiment marcher ?

Des expériences à travers le monde portent à croire à la réussite de l’Instant Payment.

Passons, par exemple, outre-Manche, chez nos « ennemis » préférés, les Anglais : la Grande-Bretagne a lancé en 2009 « Faster Payment ». Certes les puristes de l’Instant Payment s’élèvent déjà contre cette assertion et ils ont raison. En dépit de son qualificatif de « Faster », la solution anglaise est au-dessus des 10 secondes. Mais tous les ingrédients y sont déjà : rapidité de développement, utilisation rapide et progressive, succès et réussite sont au rendez-vous. En 2015, il s’est échangé plus de 1,5 milliard Faster Payments ; sur la même année civile, la France a honoré 1,2 milliard retraits dans ses automates bancaires [11].

Montons un peu plus au Nord Est et regardons la Suède ! Le lancement d’un virement instantané a conduit à la chute des transactions en monnaie qui ne représentent désormais plus que 2 %.

D’autres initiatives émergent ici et là en Australie, aux Etats Unis, …

Alors pourquoi pas chez nous autres Français et/ou Européens ?

L’IP, support de l’innovation

Bien évidemment, il s’agit bel et bien là d’une lapalissade, tout particulièrement, dans toutes les technologies liées aux mobiles, smartphones, tablettes, objets connectés, et, plus encore, dans la conservation et la protection des données.

Supposez un particulier entrant dans un magasin d’électro-ménager voulant acheter un presse-purée à roulettes. L’affaire se conclut rapidement, reste le passage en caisse :

  • Comment réglez-vous ?
  • Par virement immédiat
  • Ok

Le serveur de la caisse dialogue avec le smartphone et lui transmet les caractéristiques du paiement (montant, date, créancier), end-to-end Identification (référence de bout en bout, initiée par le commerçant), la domiciliation du magasin, …. Le smartphone émule un Instant Payment vers le prestataire de services de paiement de son propriétaire. 10 secondes plus tard, le caissier reçoit l’accusé de réception du versement des fonds au crédit de son compte. Le client part avec son presse-purée à roulettes.

Exemple souvent déroulé dans les communications (formations, conférences et petits-déjeuners) que j’ai eu l’honneur et le bonheur de réaliser depuis 2009 devant des publics les plus variés. Aujourd’hui, c’est devenu une réalité… enfin, attendons encore novembre 2017.

D’autres évolutions sont espérées autour de l’identification, de l’authentification forte, de la sécurisation : celles-ci ne doivent pas être un frein, mais bien plus, un gage de réussite.

Autres questions

Il est prévu dans un premier temps de limiter le montant de l’Instant Payment à 15 000 €. Effectivement, il faut s’assurer que le modèle économique soit fiable et pérenne, puis, que l’appétence du plus grand nombre réponde favorablement à cette révolution.

Toutefois, dans la mesure où l’IP rencontrera le succès qu’il mérite, il est fort à parier que la limite de montant tombera d’elle-même à la demande des trésoriers, comptables, etc.

Plusieurs aspects restent à développer :

  • L’un des freins à l’émergence des prestataires de services de paiement en France est l’obligation de passer par un participant direct pour échanger ses paiements vers le système de télécompensation nationale STET/CORE. L’Instant Payment doit faire voler en éclat cette contrainte et ouvrir les infrastructures interbancaires françaises et européennes au plus grand nombre des prestataires de services de paiements, y compris les prestataires de services d’initiation de paiement, tels que prévu par la Directive des services de paiements II.
  • La réussite de l’Instant Payment réside aussi dans la communication et l’information délivrée vers le grand public : les jeunes, bien sûr, mais pas seulement ; les particuliers, mais aussi les professionnels, les associations… voire le Trésor Public : bien mieux qu’un prélèvement à la source dans un imbroglio administrativo-technico-organisationnel qui suscite inquiétudes et craintes, pourquoi ne migrerait-il pas à un paiement moderne, efficace. Quel bonheur ce serait de régler son IRPP par Instant Payment, non ?

En conclusion

Demain commence dès à présent, nous y sommes et il est hors de question de ne pas être au rendez-vous de novembre 2017, et pas seulement dans les habituelles offres vitrines favorites de bien des établissements bancaires, si fiers de clamer leur présence sur telle ou telle part de marché, solution innovante, et, qui rament littéralement pour gérer les quelques contrats qu’ils réussissent péniblement à faire souscrire.

Pour finir, un petit péché d’orgueil personnel : en 2009, au salon international des Cartes de Villepinte, à la question d’un collègue du GIE Cartes Bancaires « Alors tu en penses quoi ? ». Ma réponse « D’ici à 2020, il n’y aura plus de cartes » le fit éclater de rire condamnant le provocateur que j’étais d’un optimiste « Tu es fou ! Ça n’arrivera jamais »… Ça y est : nous y sommes, ce ne sera peut-être pas 2020, mais le mouvement est lancé, la révolution est en marche, et c’est bien là l’important.

ADN’co dispense des ateliers sur le sujet : n’hésitez pas à vous renseigner sur notre site !


[1] Euro Retail Payments Board

[2] European Payments Council

[3] Maximum toléré : 20 secondes

[4] Sous couvert des processus de lutte contre la fraude (LCLF)

[5] Dans le respect des Lois contre le blanchiment et le financement du terrorisme (LAB/LAT)

[6] Fides, fideis : confiance

[7] Commission interbancaire de paiement

[8] Les prélèvements nationaux français instruisaient également une commission interbancaire de paiement, dont la continuité de l’application a été refusée par la Commissaire européenne en charge de la Concurrence, Nellie Kroes. Depuis, le 1er septembre 2014, cette CIP sur les prélèvements S€PA ne peut plus être pratiquée

[9] Une prochaine Newsletter traitera de cette thématique

[10] Règlement Universel Bancaire Immédiat S€PA

[11] Données produites au Salon PayForum, les 16 & 17 mars 2016