Enquête parlementaire sur la commission commerçant
- La ministre Christine Lagarde a chargé trois parlementaires d'enquêter sur les commissions (MSC, Merchant Service Charges) payées par les commerçants aux « organismes de paiement » (acquéreurs). Françoise Branget (Doubs), Bernard Debré (Paris) et Richard Mallié (Bouches-du-Rhône) doivent clarifier, d’ici fin juin, le fonctionnement, la composition et le niveau des commissions.
- Selon la Lettre de Matignon en effet, « les commerçants sont confrontés à des difficultés concernant les commissions payées lorsqu'ils offrent la possibilité aux clients de régler par carte bancaire : manque de transparence des frais appliqués par les prestataires, commissions anormalement élevées... Autant d'éléments qui freinent le développement du paiement par carte, qui est pourtant apprécié des consommateurs, […] moderne, sûr et efficace ».
- La mission devra :
- proposer des améliorations pour la transparence sur l'ensemble des services rendus en contrepartie des MSC ;
- suggérer des pistes pour les réduire sur les « petits montants » ;
- identifier les secteurs où elles sont « anormalement élevées », recenser les causes de ces anomalies et trouver avec l'ensemble des parties prenantes des solutions concrètes afin d’en faire baisser le niveau.
- Il semblerait que le lobbying des commerçants ait très bien réussi à impliquer Bercy. Madame Lagarde, ministre des Finances, officialise ainsi les conclusions du rapport parlementaire de Richard Mallie sur la commission commerçant (MSC), déposé en mai dernier. Le député l’avait accompagné d’une proposition de loi pour la plafonner et l’indexer sur le taux de fraude (tel qu’établi chaque année par l’Observatoire de la Sécurité des Cartes de Paiement, ou OSCP, de la Banque de France). La proposition voulait aussi rendre forfaitaire la Commission Interbancaire de Paiement (CIP) sous-jacente, l’interchange CB. Il en a résulté en octobre le vote, à l’Assemblée Nationale d’un simple amendement à portée générale. Il stipule que la MSC ne doit « pas s'éloigner de façon abusive des coûts réels supportés par le prestataire de service de paiement qui les facture » (l’acquéreur).
- L’actuelle enquête double donc la réforme entamée de la CIP, à laquelle les banques CB se sont engagées, d’ici la fin du printemps, vis-à-vis de l’ACP (voir la veille de janvier 2011). Elle est plus vaste car les « organismes de paiement » englobent aussi les systèmes privatifs, parmi lesquels ceux de T&E (ex : Diners, American Express), aux commissions bien plus élevées que celles du système CB.
- Pour autant, la lettre de mission reste très vaste :
- Le « manque de transparence tarifaire » évoqué prouve que les acquéreurs CB ont encore des progrès à faire pour appliquer la DSP de 2009 et le déliassage de l’acceptation, promu par le SEPA Cards Framework (séparation des marques de cartes acceptées et facturées) ;
- Les « taux anormalement élevés dans certains secteurs » recouvrent des situations diversement contestables : s’agit-il des secteurs les plus fraudés ? De la vente à distance non sécurisée ? La charge de traitement des impayés entraîne un surcoût : partout dans le monde, il est répercuté aux e-commerçants. Ou, vise-t-on les secteurs à panier moyen très élevés ? Dans ce cas, le montant de la commission est dopé par la partie variable de la CIP. Celle-ci, créée au début des années 1990, vit donc ses derniers jours.
- Mentionnons, de façon incidente, la déclaration, le 30 mars, de la ministre sur le maintien du chèque en France. Une étude du CCSF (Comité Consultatif du Secteur Financier) montre que la France, malgré une baisse régulière, reste le premier pays utilisateur de chèques d’Europe. Madame Lagarde a déclaré : « Cette étude me conforte dans l’idée que la suppression du chèque n’est pas une option aujourd’hui. […] L'utilisation extensive du chèque - alors qu'il a beaucoup reculé, voire disparu, chez nos voisins européens - montre que les moyens de paiement offerts en France ne remplissent pas pleinement ces objectifs». La ministre a donc demandé un rapport sur les façons de diversifier les moyens de paiement. Il devra lui être remis en octobre. Le CCSF suggère l’usage de virements améliorés.
- Après le Royaume-Uni, dont la UK Payments Association avait envisagé l’an passé la disparition du chèque à partir de 2018, l’Australie évoque la même perspective. Ce 29 mars, son régulateur, la Reserve Bank of Australia (RBA), a engagé les banques à innover plus, afin de pouvoir statuer sur son éventuelle suppression.
Voir la veille de janvier 2011